Un an après un essai remarquable, voilà que le Jazz et le Zouglou prévoient de se rencontrer. Lors de la précédente édition de L’Emoi du Jazz, ces deux genres musicaux se tiraillaient allègrement à coup de guitares, de saxophones, et de tam-tam. A  observer le concept de la compétition d’interprétation Jazz – Zouglou, on se pose la question de savoir comment deux genres musicaux a priori opposés peuvent se rencontrer ?

Par David Dolégbé

Ménage a priori impossible

En effet, le Jazz, international, a la réputation d’être la chose d’une l’élite bourgeoise et des jeunes branchés tout au plus. Tandis que le Zouglou, local, est réservé à une classe moyenne et considéré comme l’hymne des quartiers populaires de Côte d’Ivoire. De nos jours, ce tableau est la constante confrontation entre deux classes sociales. Chaque couche s’identifie à un style de musique qu’elles revendiquent bien souvent. C’est aussi, le fort ou la nature de l’être humain, habitué aux distinctions, aux séparations, quitte à fermer les yeux sur ce qui pourrait créer le rapprochement.

Des points de rencontre

Et pourtant, il suffit d’être un chouia disposé pour envisager que le Zouglou soit « jazzifié », ou le Jazz « zougloufié ». D’ailleurs ces deux genres ont des points en commun qui facilitent une réunion.

Tout d’abord, le Jazz et le Zouglou prennent leur origine dans des mouvements de revendications sociales et politiques. Les sulfureuses mélodies du Jazz trouvent leurs racines dans les lamentations d’esclaves noires dans les champs de coton, des colères et des révoltes d’esclaves fatigués d’être exploités. Du blues de cette période sombre s’est inspiré le Jazz.

« Le Zouglou est le blues des ivoiriens » affirme Marie-Stella Gadeau en évoquant le concours d’interprétation Jazz-Zouglou.

Il est né du désespoir favorisé par la crise socio-économique des années 90 en Côte d’Ivoire. Dans les campus de la capitale, les étudiants l’ont formulé à partie de texte, d’instruments de musique basique, et de pas de danse illustrant les supplications et l’appel à l’aide.

Ensuite, ces deux genres de musique ont en commun le sens de l’improvisation, de la folie, ayant certes des codes clairs mais se permettant de sortir des lignes. Dans les accords Jazzy, le chanteur peut se laisser aller dans tous les sens, monter et descendre. Les musiciens font aussi preuve d’imagination. On se souvient de la prestation d’Isaac Kémo lors du MASA 2018 où il fait intervenir des sonorités expérimentales (Journaux claquant dans l’air) et des traditionnelles ivoiriennes.

Les Zougloumen se prêtent également au jeu de l’improvisation. C’est même le point fort du Zouglou. L’ambiances facile avec le Woyo, celle qui frise l’amusement et emporte le public des espaces publics, quartiers généraux du genre.

Alors oui, le ménage Zouglou et Jazz pas du tout hasardeux quand on voit le sens élevé de la liberté qu’ils ont en partage.

Un concours pour officialiser l’union

L’Emoi du Jazz envisage donc de mettre en valeur ces nuances et ressemblances, en les confrontant dans une compétition des talents de la musique. Les manches éliminatoires ont eu lieu dans le courant de Mars et ce sont 8 équipes qui ont eu leurs tickets pour la finale. Pour y arriver, il fallait interpréter sur un air de Jazz, le tube “Abidjan Farot” du groupe espoir 2000. Ce groupe interviendra d’ailleurs, aux côtés de Somi pour monter l’exemple aux plus jeunes.

La grande messe aura lieu le 3 Mai 2018 à l’université Felix Houphouêt Boigny de Cocody à partir de 19h. Les groupes devront faire preuve d’originalité pour séduire le jury et ainsi repartir avec la somme de 1 000 000 Fcfa.

Pilotée par Marie-Stella Gadeau, cette initiative l’Emoi du Jazz, 8ème édition s’inscrit dans la vision de promouvoir la destination Côte d’Ivoire. Et aussi, valoriser les artistes locaux qui ont du potentiel.

 

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